De la Liberté de Conscience
Je ne vous apprends rien. L’économie a sa littérature, sa rhétorique propre et ses paraboles : Depuis la Fable des Abeilles jusqu’à la Bouteille sans le Vin en passant par la Main Invisible celle-ci a fait un bon bout de chemin, pour arriver enfin là où elle est: Globale et souveraine. Il ne sert à rien de dire qu’il y va de son itinéraire occidental et qu’il y a lieu d’accuser une distance, celle que nous font prendre notre culture, notre religion, notre histoire et notre façon d’appréhender le monde, d’y être … etc.
L’économie du marché est une et indivisible : « laissez faire, laissez passer » et l’on ne saurait être éclectique à son sujet. De même qu’un Japonais ne se permet pas de dire qu’il pratique un libéralisme à visage bouddhique, un musulman ne saurait se réclamer d’un quelconque libéralisme islamique, sans encourir le ridicule : on ne peut se positionner à équidistance de l’un et de l’autre sans trahir et l’un et l’autre … « faites vos jeux ! » dirait la bouche d’ombre.
Que le PJD (Parti de la Justice et du Développement) fasse de la moralisation de la vie publique sa revendication majeure cela ne devrait déranger personne. Par contre, les postulats religieux qui sous-tendent cette « injonction » quant à eux inquiètent et posent problème. En effet, ce parti, islamiste, entend en appeler plus à la forte demande idéologique du peuple marocain, surtout ses laissés pour compte qu’à une vision politique. Combattre la corruption, dans sa rhétorique , est plus un précepte religieux qu’une mesure rationnelle susceptible d’accroître la productivité, remblayer le credibilty gap crée par des années de mauvaise gestion…Allah maudit le corrupteur et le corrompu nous disait-on mais l’on se donnait jamais la peine d’ajouter que le premier pas pour combattre cette incurie est de payer ses impôts rubis sur ongle. Mais dans sa grille de valeurs, le dîme passe avant l’impôt.
Nombreuses sont les autres « injonctions » pjdistes, je citerai celles qui font les choux gras de son organe éditorial à savoir l’islamisation du secteur bancaire et l’interdiction des boissons alcooliques… Pour la première, on ne leur dira jamais assez qu’il est impossible d’asseoir une économie, %100 islamique, qui ne serait pas traversée de part et d’autre par le capitalisme mondial avec tout ce que ce vocable charrie de connotations diamétralement opposées à ladite injonction.
Pour l’autre précepte religieux, l’interdiction des boissons alcooliques, force nous est de convenir de la réussite du PJD -une réussite sournoise devrais-je ajouter. Le parti a crées des jalousies au sein du parlement au point de voir d’autre partis lui emboîter le pas dont les partis dits démocratiques et progressistes. Dès lors, Il est devenu de bon ton de crier mort au Bacchius et au Brandicus, au vin et à la bière qu’aucune personne n’ose plus leur porter ne serait-ce une ombre de contradiction… l’atmosphère ainsi créée me rappelle curieusement celle connue aux USA voilà un siècle. Au fort de la Prohibition, les « ivrognes » de l’époque allaient s’embrigader dans des sectes religieux qui faisaient de l’alcool un précepte obligatoire. Les Etats-Unis d’alors leur en laissaient le loisirs pour autant qu’ils soient munis d’une carte d’adhésion à une des sectes en question… un siècle après, nous y voilà au Maroc, grâce en soit rendue au PJD. Les bars ont cessé d’être ce qu’ils sont partout dans le monde : un lieu où on vide les bouteilles des étagères dans les WC pour devenir un haut lieu d’un culte inédit au Maroc : LA LIBERTE DE CONSCIENCE.