de la poétique du béton et de ses implications politiques
Pour juger de la nature d’un régime politique donné, le bon sens veut qu’on consulte la doc officielle, la constitution en tête. Les plus avisés vont jusqu’ à compulser les titrres éditoriaux, voir quel ton y adopte-t-on, quels sujets y sont traités … ce n’est qu’en dernière analyse qu’il peut enfin articuler une sentence là-dessus.
Plus avisé encore et plus pratique sera celui qui, les mains dans les poches, se contentera d’une tournée en ville –peu importe laquelle et pourvu que ce soit à pieds ferme et dans un pays étranger. De la lecture des noms des boulevards et des plaques commémoratives, de la conception des places publiques, de leur nombre ainsi que du plan directeur de la ville en question, le visiteur peut se former une opinion politique tout aussi fiable que la première, faite à partir de la documentation officielle, des journaux … A ce niveau, une dictature ne cherche qu’une chose : une ville quadrillée au détriment de toute autre considération qu’elle soit esthétique ou autre. Du temps de Nicolae Ceausescu, les visiteurs admiraient une bâtisse, le Congrès du Peuple, que le dictateur avait édifié à la « gloire » des camarades roumains. Pour cerner une de ses poutres, il fallait s’y mettre à six et se donner les mains tout autour. L’exercice relevait presque du rituel que rares sont les intellectuels arabes de gauche qui n’y aient pris une photo pour l’histoire. Tant qu’on était logé et nourri aux frais de la princesse, il était bien évidemment mal vu de trouver au palace ce seul défaut : qu’il était bâti sur un site historique, plusieurs fois séculaire… Le même travers, en plus caricatural, était le fait de Saddam avec son nom, en entier, gravé sur les parois des lieux de cultes assyriens, babyloniens ….
Je me suis essayé à ce jeu-là et me suis trouvé avec un enseignement mitigé : ce n'est pas une dictature mais ce n'est pas une démocratie non plus. Disons : une monarchie, sans plus ...