L’une des
questions qu’on n’a
eu de cesse de poser tout au long du SIEL,
Salon
International de l'Edition et du Livre de Casablanca, était de savoir si le
livre lui viendrait d’être
déclassé en
faveur d’ internet… au Maroc. Ce genre de questions
n’est pas sans me rappeler la
réponse que me faisait ma mère chaque fois que je
la taquinais en lui disant qu’elle
ferait mieux d’accélérer ses cours
d’alphabétisation pour pouvoir lire Nietzsche,
sa foi jusque-là à toute épreuve ne
s’en trouverait qu’affermie. Elle savait la
question vicieuse et me répondait
que tout ce qu’elle ambitionnait ici-bas était et
est de lire le coran dans le
texte –ce qui est proprement un exploit pour une
Berbère de sa génération- et que pour le reste,
elle voudrait bien rester analphabète, comme le
prophète, son modèle. Quand je
n’arrivais pas à lui expliquer un de ces mots
coraniques qui parsemaient ses
heures de lecture, ce qui m’arrivait souvent, elle se
demandait l’utilité de
tous ces livres dont je faisais grand cas … autant les
brûler ! Me
disait-elle, s’ils ne peuvent pas nous avancer dans la
compréhension du Livre,
le coran. Elle ne savait pas que dans tout le pays rares sont les
personnes qui
peuvent se dire suffisamment au fait de la langue arabe pour le lire,
le coran
donc.
Cette
réponse me rappelle à son tour la
réaction d’un religieux musulman le lendemain
de l’incendie qui a détruit la bibliothèque
d’Alexandrie : si les milliers
de livres qui ont pris feu étaient conformes aux exigences
de la foi, on aurait
rien perdu : tout est encore dans le coran. S’ils
sont du genre impie :
bon débarras !
Ce détour
est pour répondre à la
question précitée : Internet tuera-t-il
le livre au
Maroc ? Deux réponses possibles : 1-
depuis quand le livre avait-il
ses lettres de noblesse dans notre
société ? majoritairement
analphabète
pour qu’internet lui ravissse la vedette. 2- il peut tuer le
livre, mais jamais
la lecture.
Aussi,
l’événement éditorial au
Maroc ces derniers jours, à mon sens, est-il là
où on
s’y attendait le moins, le SIEL. C’est
plutôt le prix discerné récemment par
un
émir du Golfe à un jeune écrivain
marocain pour son premier roman : kama
yaliqo bi maghribiyati (ainsi qu’il sied à une
Marocaine) … je n’en dis pas un
mot pour l’instant. A suivre …